Les services à abonnement sont devenus une norme pour beaucoup de personnes de nos jours, et pour presque tout. Netflix, Disney+, Prime Video ou encore prochainement Max proposent tout ce qu’il faut pour avaler des milliers d’heures de films et séries, Spotify ou Deezer nous servent des millions de musiques sur un plateau pour une bouchée de pain, et côté jeux vidéo, on a de gros services comme le PS Plus ou encore le Xbox Game Pass pour jouer à des centaines de jeux à moindre coût. Oui, là où autrefois mettre la main sur une boite de jeux, une VHS ou un DVD, un livre ou un album avait un petit quelque chose de satisfaisant, désormais, c’est l’open bar.

Trop d'abonnements, tuent l'abonnement

Un gigantesque fast-food où l’on mange tout et n’importe quoi jusqu’à plus soif, sans même regarder ce qu’on a dans l’assiette. On se contentera de balancer les couverts lorsque ça ne nous plaira pas ou que ce n’est pas à notre goût pour changer de menu tout aussi brusquement. C’est un constat que beaucoup font, l’industrie du jeu vidéo, ou même de la SVOD, est devenue une grosse machine rutilante que nous alimentons autant qu’elle nous alimente.

Sur le papier, ces services devaient être de véritables "révolutions", et s'ils ont bien bousculé toutes leurs industries respectives (Spotify pour la musique, Netflix pour le cinéma, le Xbox Game Pass pour le jeu vidéo), le fait est qu’elles ne sont pas aussi révolutionnaires qu’attendues. On sait par exemple que Netflix peine à être rentable, il pédale dans la semoule et semble presque dépassé par sa proposition. C’est aussi ce qu’il se passe du côté du jeu vidéo avec le PS Plus et le Xbox Game Pass. Pas de chichi, pas de guéguerre, tout le monde est dans le même panier.

Services jeux vidéo : Ubisoft+, EA Play, Xbox Game Pass et PS Plus ©Gameblog
PS Plus, EA Play, Xbox Game Pass, Ubisoft+... on ne s'y retrouve plus ©AUR - Gameblog

PS Plus ou Xbox Game Pass, même combat, ça ne performe pas comme il le devrait

C’est en tout cas le constat de nombreux professionnels du milieu, dont l’analyste Mat Piscatella (Circana), qui déclare que les services à abonnement, hors jeux mobile, comme le PS Plus ou encore le Xbox Game Pass stagnent pour une nouvelle année consécutive avec une évolution de seulement 1%. Discours qu’il avait notamment tenu en 2023, ce n’est donc pas nouveau. Là où ces services devaient exploser, ils n’ont finalement fait que beaucoup de bruit et lancé une tendance de course permettant au "toujours plus" obligeant de nombreux acteurs à s’y engouffrer. C’est ce qu’il s’est notamment passé avec le Xbox Game Pass, bien que Sony tentait de nous faire croire qu’il ne cherchait pas à combattre le Game Pass avec la refonte de son PS Plus. Évidemment. Malheureusement, les services à abonnement ne soulèvent pas les foules plus que ça, et se pose alors la question de la rentabilité.

Et si ces fameuses formules miracles ne sont pas si rentables que ça, c’est entre autre parce qu’elles coûtent cher. Chaque jeu dans le catalogue est le résultat d’une collaboration qui coûte un bras. Des coulisses où l’on brasse des centaines de milliers de dollars, et où l’on fait signer des contrats stratégiques, au même titre que les exclusivités (temporaires ou non) ou les jeux gratuits. On a pu le voir pendant le drama Xbox vs Sony alors que l’entreprise japonaise tentait d’empêcher Microsoft de racheter Activision. Des documents avaient été dévoilés, mettant en lumière des manœuvres stratégiques à base de gros contrats d’exclusivité pour empêcher certains titres de rejoindre les catalogues de la concurrence, ou plus largement la plateforme.

Des services qui sont plus lourds pour les entreprises que pour les joueurs

Les services par abonnement pèsent dans la balance, et obligent tout le monde à s'adapter en conséquence, mais pour l’heure, il semble peser plus sur les épaules des différents acteurs de l’industrie que dans le portefeuille. De notre côté, ce que nous voyons, ce n’est qu’un océan de jeux que l’on ne prendra même plus le temps de faire, que l’on picorera pendant quelques heures. Ou encore une pluie de jeux gratuits que l’on collectionne sans même y prêter attention.

Mais curieusement, la majorité des joueurs, la masse qui pourrait rendre ces services rentables et révolutionnaires comme ils devraient l’être, n’a pas réellement changé sa façon de consommer. Une grande partie des joueurs et joueuses, peu importe la plateforme, ne se contente que de quelques jeux chaque année et donc ne s’intéresse pas vraiment à des abonnements mensuels où l’on a accès à des centaines de jeux. Ça pourrait bien être là l'une des raisons qui fait que rien ne décolle comme prévu, du moins qu'il n'y ait aucune croissance rapide, bien que beaucoup d'autres arguments peuvent aussi être mis sur la table.

Sony a du revoir sa stratégie pour s'adapter et a divisé le PS Plus en trois formules ©Sony - PlayStation.com

Trop de jeux, pas assez de temps. Un argument qui dessert le PS Plus et le Xbox Game Pass

Le jeu vidéo est extrêmement chronophage, tout le monde n’a pas le temps de s’investir des dizaines d’heures chaque semaine, beaucoup préfèrent simplement se lancer une partie de FIFA, pardon, de FC 24 en rentrant du boulot pour décompresser, ou se laisser absorber des heures par un Minecraft, un Helldivers 2, ou quelques parties de Modern Warfare 3. Ce n'est pas pour rien que Sony se faisait des cheveux blancs lorsque Microsoft a commencé à mettre sa main sur Activision.

Sans parler de tous les jeux compétitifs ou encore des free-to-play qui concurrencent énormément les services comme le PS Plus et le Xbox Game Pass. Des jeux comme Fortnite, ou encore Warzone, Rocket League et tant d'autres, des AAA gratuits qui proposent une expérience complète, prenante, chronophage sont de véritables démons pour les services à abonnements.

Avec des jeux complets et aussi addictifs accessibles gratuitement, ce sont des milliers de joueurs qui restent scotchés sur un seul et unique titre. Parfois ils dérivent sur d’autres free-to-play lorsque l’un d’eux les fatiguent, ou ils se lancent sur un titre offert, un jeu en promotion peut-être. Un comportement qui n’est pas isolé. On se souviendra notamment que Matt Booty, patron des Xbox Games Studios, avait souligné la puissance de frappe des jeux comme Fortnite et Roblox, ce qui avait carrément obligé Xbox à revoir sa stratégie. Et sa stratégie aujourd'hui est l'expansion sur d'autres plateformes, notamment la PS5, en plus de continuer à garnir son Xbox Game Pass.

Il y a tout de même plusieurs millions d'abonnés, il y a quelque chose à faire

Alors, bon, on parle de rentabilité et de stagnation, mais il ne faut pas oublier que le PS Plus et le Xbox Game Pass comptent plusieurs millions d’utilisateurs quotidiens. Les chiffres exacts varient beaucoup et en général on attend les bilans annuels pour faire le point. Seulement voilà, stratégie ou volonté de cacher un peu les aléas de leurs services, Sony et Microsoft font un peu leur tambouille.

Sony aime bien mélanger toutes ses formules histoire de gonfler ses chiffres alors qu’entre le PS Plus Essential et le Premium il y a un monde. On comptait environ 47 millions d'abonnés au PS Plus en mai 2023, et seulement 14 millions d'entre eux possédait une formule Extra ou Premium. De son côté, Microsoft nous rabâche souvent les mêmes statistiques pour nous rappeler que son Game Pass. Les derniers chiffres date du début d'année et le Game Pass comptait environ 34 millions d'abonnés. Et de temps en temps, il nous avoue qu’il ne touche toujours pas une cacahuète. Récemment, il a même divisé son offre en proposant le Xbox Game Pass Core, anciennement connu sous le nom de Xbox Live Gold. Une formule light et moins cher pour attirer encore quelques joueurs et venir embellir ses chiffres dans la foulée, même si on ne parle pas du gros Xbox Game Pass.

La nouvelle cartouche tirée il y a peu, le Xbox Game Pass Core, une formule light et accessible

Le PS Plus et le Xbox Game Pass ont encore des cartes à jouer, on n'en a pas fini

En définitive, on constate que tous les acteurs majeurs de notre industrie fétiche se sont lancés dans une course au "toujours plus grand, toujours plus gros". Des AAA en day one par-ci, des jeux offerts par là… Tout le monde y va de son petit privilège pour essayer de vendre un abonnement qui, finalement, met la pression à tout le monde. L'industrie est en tension quasi constante. Pourtant, ses services ont bien du mal à se présenter comme étant LA fameuse recette révolutionnaire et incontournable. Pour les joueurs qui peinent à se plonger de longues heures dans un seul et même jeux, ou qui préfère grignoter ici et là par contre, c'est la fête ! Des centaines de jeux, partout, tout le temps, à picorer.

En revanche, pour les autres, ça ne change absolument pas leur vie, et ils continuent de jouer tranquillement à quelques titres dans leur coin, ou voueront encore un culte infini qu’à une poignée de jeux chaque année. Si le PS Plus et le Xbox Game Pass veulent exploser, c’est à ces joueurs qu’il va falloir apprendre à parler. Et dans le même temps, il va peut-être falloir penser à réduire la voilure histoire de laisser tout le monde digérer et respirer parce que pour le moment on est gavé comme des oies et l’on n’en demandait pas tant quand on y pense.